ANI* : les plus grandes luttes se mènent à l'entreprise !
Mardi 5 mars 2012, la CGT 59 participera à la journée unitaire nationale « privé-public » contre la transposition dans la loi de l'ANI * signé le 11 janvier dernier par trois officines syndicales (cf. tract ci-joint)
Elle appelle les agents du Département à rejoindre les manifestations locales : Douai - Valenciennes - la manifestation régionale qui partira de la Porte de Paris à 14 h 30 à Lille ou la manifestation nationale qui partira du Châtelet vers 14 heures pour rejoindre l'Assemblée Nationale.
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L'ANI, chronique d' un accord de scélérats :
Mai 2011 : la CFTC, la CFDT et la CGC signent avec le Medef un « Diagnostic commun sur la compétitivité française » qui vise à « dépasser les approches idéologiques » et précise que « le coût du travail est considéré particulièrement important par les entreprises ».
Traduction : les profits (la part de travail impayée par les patrons et les actionnaires) sont insuffisants et il faut faire baisser la part des salaires dans la répartition de la valeur ajoutée.
Solutions : Augmenter la part de travail impayée en allongeant la durée du travail, en diminuant les cotisations sociales patronales avec une bascule sur la fiscalisation des revenus de transfert ( pensions, allocations chômage, remboursement des frais de santé) ; maintenir un taux élevé de chômage ; mettre en concurrence les travailleurs et faire baisser la rémunération du travail.
Moyens : L'exploitation de classe utilise corrélativement des instruments répressifs (police, armée, vigiles, bandes mafieuses, et au mieux hiérarchie...), économiques et idéologique pour obtenir l'intégration consentie des salariés. L'Etat est la « première puissance idéologique » qui travestit les tares sociales du système de production et maintient l'hégémonie de la bourgeoisie. Ses instruments ? Les institutions : religion, école, famille, medias, les partis bourgeois et leurs élus, certains syndicats, leurs encadrants et leurs permanents, etc...
L'accord national interprofessionnel conclu le 11 janvier dernier entre le patronat et trois organisations pro-capitalistes n'aurait dû surprendre aucun militant. Il s'inscrit sans surprise dans la stratégie de cogestion de ces syndicats et répond à la lettre, à la feuille de route des gouvernements UMP et socialiste (2002 – 2012). C'est en vain que les électeurs ont sorti Sarkozy et permis la victoire d'un candidat socialiste. L'accord scélérat fait désormais l’objet d’une transposition fidèle dans un projet de loi et au nom d'une certaine conception de la « démocratie sociale » défendue par François Hollande et son premier ministre.
Il convient de rappeler que l'ANI a été précédé par le rapport Gallois du 5 novembre 2012, remis au Premier ministre et intitulé « Pacte pour la compétitivité de l’industrie française ». Ce document de commande qui préconisait « un choc » par des mesures économiques drastiques produisait également toute une série de préconisations sociales proches des dispositions de l’accord du 11 janvier
Pourtant, la dernière décennie a été particulièrement bénéfique pour le patronat qui ne compte plus ses victoires : retraites, exonérations de cotisations sociales, durée du travail, droit de grève, rupture conventionnelle...
Mais portés par l'offensive européenne de remise en cause des droits sociaux, les patrons français et le MEDEF surenchérissent. L’accord national interprofessionnel leur donne satisfaction et va contaminer tout le droit du travail. Sa transposition en loi constituera une avancée vers la mise en place d’un régime néolibéral du travail destructeur politiquement et socialement. Les élus de la majorité le savent pertinemment. On trouve parmi les députés et les sénateurs les spécimens ancillaires les plus stupéfiants.
Quelques précisions techniques pour alimenter la colère :
L'accord n'était pas applicable en l'état car ses dispositions modifient des dispositions légales et réglementaires. La signature majoritaire (3/5) par trois syndicats félons minoritaires (28 % aux élections TPE en 2012 et 38 % aux prud'homales en 2009) n'y change rien. C'est bien parce que ce gouvernement, élu par les militants et les électeurs de gauche, décide de le transcrire dans le droit qu'il pourra s'appliquer. Le Parlement n'a pas à coller pied à pied à l'accord majoritaire entre « partenaires sociaux » mais seulement à en tenir compte (articles L2 – Code du Travail – Loi Larcher). François Hollande constitutionnalise le dialogue social comme prévu dans son programme en donnant une « autonomie normative aux partenaires sociaux » (eh oui, il faut lire les programmes) et "dépolitise le social" en bon néolibéral. C'est un aspect complémentaire de la gouvernance qui donne de plus en plus une autonomie normative aux experts et aux technocrates non élus. Le Medef est au pouvoir en France et le capitalisme aux commandes du monde. La démocratie bourgeoise n'est plus qu'un paravent déchiré et crasseux qui pourrait céder la place aux technologies de contrôle au mieux et à la loi martiale mondialisée au pire. Et pour ceux qui pensent à la montée des fascismes, ils ne sont pas un obstacle pour le capitalisme, juste un de ses bras armés contre les travailleurs.
Pour l'instant, la transcription de l'ANI dans la loi affaiblit le droit du travail qui protège les salariés. Dans le même temps, le pouvoir socialiste réforme de manière réactionnaire l'Inspection du travail sans l'excuse d'une quelconque contrainte budgétaire. Les agents n’auront plus ni continuité de terrain, ni vision globale dans la durée, ni maîtrise de leurs actions. C’est aussi la fin de la défense du droit du travail pour des millions de salariés.
Et on entend dans le corps de l’inspection qui a voté à gauche, pour le changement, ulcéré déjà par dix années de droite : "Et il y a l’ANI en plus et en même temps !" Mais "ça va péter, et ça ne sera pas gentil, ils en font trop, avec nous et avec les salariés, trop de reculs, trop de reculs, il leur arrivera des pépins sérieux quand ça va bouger".
Oui, ça va péter et la CGT 59 - si elle peut être utile - prendra toute sa place dans l'action !
*ANI : accord national interprofessionnel sous-titré « pour un nouveau modèle économique et social de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariés ».