Convention des départements de France - Lettre ouverte aux présidents des conseils généraux
On ne va pas continuer à brutaliser des enfants
pour des raisons budgétaires !
Lettre ouverte aux présidents de conseils généraux
à l'occasion de la convention des départements de France de 9-10-11 octobre 2013
L'action sociale, en particulier la protection des enfants, est censée être la première mission des départements. Cependant, dans les conseils généraux, le social est devenu un chiffre, un budget, de la gestion, du management : plus rien d'humain !
Les premières victimes sont les enfants en danger. Quand la justice identifie un danger dans leur famille, en les confiant aux départements (services de l'aide sociale à l'enfance), ces enfants sont trop souvent placés à un endroit, puis à un autre... avec des accompagnements qui sont loin du sur-mesure nécessaire. Le tout sans se poser la question sur les conséquences sur leur devenir, puisque c'est le réflexe budgétaire qui prime.
Et les assistants familiaux (familles d'accueil), salariés des départements, ne peuvent procurer aux enfants qui leur sont confiés stabilité et affection : l'isolement de ces professionnels, l'absence d'écoute, de soutien, d'analyse de leur travail d'accueil ne permet plus de travail de réparation et entraîne des demandes de ré-orientation lorsque les problèmes de l'enfant accueilli submergent la vie familiale ; ils sont trop souvent victimes des licenciements abusifs, sous des prétextes fallacieux. Cela se traduit pour les enfants concernés par une nouvelle adaptation à un nouvel accueil, au mépris des effets déplorables sur un public déjà fragile.
De plus, depuis 2002, la loi permet le « placement à domicile » : l'enfant est identifié comme étant en danger dans sa famille... mais reste chez ses parents, avec des visites d'un travailleur social : ça coûte moins cher qu'un internat ! Même s'il ne s'agit pas de faire preuve de défiance systématique à l'égard des parents ou de systématiser les placements, on peut s'interroger sur les raisons de développer de plus en plus ces mesures et dénoncer une dynamique réactionnaire qui accorde la prévalence aux liens biologiques.
Quant aux mineurs isolés étrangers, ils semblent être « étrangers » avant d'être des enfants, fraudeurs avant d'être réfugiés. Ils sont soumis à un traitement discriminatoire et ostracisés : un dispositif spécial tente de satisfaire les exigences de départements, toujours plus nombreux à se plaindre d’avoir à prendre en charge sur leurs finances des enfants étrangers qui n’ont aucune attache avec leur territoire.
Selon un argument régulièrement invoqué par les conseils généraux et repris par l’Association des départements de France, les mineurs isolés étrangers seraient avant tout des migrants, dont la responsabilité incomberait à l’État. Concrètement, c'est un principe de suspicion qui prévaut : afin d'estimer s'ils ont moins de 18 ans, ces jeunes sont quasi- systématiquement soumis à des tests médicaux injustifiables (exposition d'enfants à des radiations ionisantes sans intérêt thérapeutique dans un but purement administratif), intrusifs, dégradants et dénués de valeur scientifique (capacité testiculaire, examen pelvien, test de pilosité, examen gynécologique) et mis à l'index comme tels par le Commissariat aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe.
Même pour ceux qui sont reconnus mineurs, les vexations et les ennuis ne sont pas terminés : parce qu'ils sont étrangers, et parfois là où des liens de confiance ont commencé à être noués, ils peuvent être envoyés à l’autre bout de la France. Il s’agit donc avant tout, pour les départements les plus sollicités, que d'autres les prennent en charge. Au prétexte de répartition équitable de la « charge budgétaire » qu'ils représenteraient, c'est une véritable péréquation horizontale inversée qui est mise en place. Mais pour le coup, on ne redistribue pas des écarts de richesse mais on se répartit des humains.
Globalement, l'enfance est bradée, l'adolescence bâclée, et l'adulte bousillé : c'est l'avenir de centaines de milliers d'enfants sacrifiés sur l'autel comptable.
Ce qui devrait primer, c'est l'intérêt des enfants !
Des mesures peuvent être prises par les conseils généraux pour éviter une maltraitance supplémentaire à des enfants, français ou non, déjà abîmés par la vie :
- des moyens et une organisation des services de protection de l'enfance permettant prévention auprès des familles en difficulté et accompagnement personnalisé et sur-mesure des enfants en danger ;
- un véritable statut pour les assistants familiaux ;
- l'encadrement plus strict des placements à domicile ;
- la fin des mesures discriminatoires à l'encontre des mineurs étrangers, et notamment la suppression des tests médicaux, dont le manque de fiabilité est démontré, pour estimer l'âge d'un enfant.